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Qui ne s’est jamais posé la question de savoir s’il était possible de convertir l’énergie dépensée à marcher, courir, nager… en électricité ? Et si chacun de nos pas ou chaque mouvement était convertible en énergie ? Et si tout ce qui nous entoure — sols, objets, accessoires ou vêtements — pouvait générer aussi de l’électricité utilisable ?
Le principe de « récolte d'énergie » (energy harvesting) prend la forme d’une douzaine de procédés — vibratoires, thermiques, cinétiques ou autres — pour extraire depuis des sources externes d’infimes quantités d’énergie, puis les emmagasiner et les convertir en électricité réutilisable.
Tout cela est connu et utilisé depuis longtemps, mais notre profonde connaissance de la matière, conjuguée à la maîtrise de la miniaturisation électronique, laissent entrevoir des perspectives nouvelles. La recherche dans ce domaine progresse vite, tandis que les applications potentielles se multiplient.
L’un des phénomènes les plus anciens dans ce domaine est la piézoélectricité : certains matériaux, sous l’effet d’une contrainte mécanique, se polarisent et produisent une petite quantité d’électricité. Le principe a été mis à profit dans plusieurs familles d’objets usuels du siècle passé, comme les allume-gaz (on applique une pression pour provoquer une tension électrique qui se libère sous la forme d’une étincelle) ou les montres à quartz.
Le phénomène est désormais exploité pour des applications plus actuelles. La société française Enerbee produit par exemple un micro-générateur combinant des effets piézoélectriques et magnétiques qui transforme une énergie mécanique (flux d’air, rotation...) en électricité. Il peut produire « de 1mW à 10mW, soit l’équivalent de 1,5 à 6 pilles AA chaque année. L’électricité est utilisée pour alimenter différents types de capteurs électroniques. L’entreprise propose ainsi un appareil pour analyser la qualité de l’air intérieur, sans fil et déconnecté du grid — donc à la fois mécanique et électronique, mais néanmoins 100% autonome en énergie.
Et les recherches dans ce domaine se poursuivent. En mars 2021, des chercheurs suisses (EMPA et ETH) ont présenté un prototype de parquet générant de l’électricité. L’idée est de traiter le bois pour le transformer en une sorte d’éponge piézoélectrique : « Lorsque cette structure est comprimée, les zones différemment chargées sont déplacées de telle sorte qu'une tension électrique est générée et peut ensuite être récoltée », expliquent les chercheurs. Un petit cube de 1,5 cm de côté, soumis à 600 cycles de charge «avec une stabilité étonnante », produit à chaque charge environ 0,63 V — une tension suffisante pour alimenter un capteur. Et une trentaine de ces blocs de bois placés côte à côte, chargés parallèlement par le poids d'un adulte, « peuvent déjà éclairer un simple écran LCD ».
Une autre possibilité tient à l’utilisation des ondes. Notre monde est baigné en permanence par des flux d’ondes de diverses natures et de fréquences variées, et l’on sait déjà en convertir certaines en électricité.
Là aussi, l’utilisation (et la conversion) d’ondes pour produire de l’électricité est avérée depuis longtemps. Certaines des solutions d’électricité et de recharge sans fil à moyenne ou longue distance tirent parti de cette logique. C’est aussi le cas des technologies NFC et RFID : un terminal émet une radio-fréquence qui est reçue par un objet « passif » (sans batterie, comme un pass de transport en commun ou une carte bancaire). L’objet convertit ces ondes en électricité pour émettre à son tour des données. Il est donc en quelque sorte « alimenté en énergie » sans fil et à courte distance, juste le temps d’une transaction, via une onde radio.
Mais le principe semble pouvoir se généraliser pour tirer parti des ondes omniprésentes et « sous-utilisées ».
L’année dernière, des chercheurs du MIT ont montré le design d’un récolteur d’énergie à base de graphène capable d’absorber les radiations térahertz pour les convertir en électricité. Ce sont des ondes intermédiaires, dont la fréquence se situe entre les micro-ondes (utilisées par les fours) et l’infrarouge (utilisées par certaines télécommandes). L’exploit du MIT est donc prometteur puisque, à peu de choses près, tout objet (y compris le corps humain ou le cosmos) émet ce type de radiation en permanence. « Les ondes térahertz sont omniprésentes dans notre vie quotidienne et si elles étaient exploitées, leur puissance concentrée pourrait potentiellement servir de source d'énergie alternative », expliquent les ingénieurs américains, qui imaginent déjà utiliser la technique pour alimenter de petits appareils électriques, comme des implants.
En mai 2021, des chercheurs de l’Université nationale de Singapour ont montré un oscillateur électronique qui se nourrit des ondes de la fréquence utilisée par le Wi-Fi pour produire de l’électricité. L’intérêt est facile à comprendre : « Nous sommes entourés de signaux Wi-Fi, mais quand nous ne les utilisons pas pour accéder à Internet, ils sont inutiles et c'est un énorme gaspillage. Nos travaux sont une étape vers la transformation des ondes radio à 2,4 GHz, omniprésentes, en source d'énergie verte, réduisant ainsi la nécessité de batteries pour alimenter les appareils électroniques utilisés régulièrement ». Des travaux similaires émanant de quatre universités (dont le MIT et l’Université de Madrid) avaient été publiés en 2019, montrant la possibilité de fabriquer des composants souples capables de récolter l’énergie des signaux Wi-Fi. Selon les chercheurs, le procédé serait généralisable pour produire de vastes panneaux qui pourraient recouvrir les murs des immeubles — et générer de l’électricité sinon gratuite, du moins inexploitée aujourd’hui.
Une autre caractéristique de la matière fait l’objet d’un fort intérêt académique : l’effet triboélectrique. Certains matériaux se chargent électriquement quand on les sépare d’autres matériaux et le fait de les rapprocher à nouveau produit de l’électricité. C’est bien distinct de la piézo-électricité (qui provient de la déformation d’un matériau) puisque la triboélectricité est produite par la mise en contact de deux matériaux différents. Et de très nombreux matériaux — métal, bois, polymères ou fibres textiles — présentent cette caractéristique (l’électricité statique, avec de micro-étincelles qui apparaissent quand on enlève certains vêtements, est l’une des formes de l’effet triboélectrique).
Sur cette base peuvent être créés des nano générateurs triboélectriques (TENG) : des composants électroniques réagissant à de très faibles pressions et capables de produire de l’électricité.
La technique est récente (les tout premiers TENG ont été mis au point en 2012) mais les perspectives sont faramineuses. « Un nano générateur triboélectrique (TENG) peut être utilisé pour récolter de nombreuses formes d'énergie qui sont généralement gaspillées. Son mécanisme est très simple et sa conception facile le prédispose à être utilisé pour alimenter de nombreux petits appareils électroniques portables. Les propriétés du TENG le rendent capable de produire une forte puissance et d'être utilisé à l'avenir pour produire de grandes quantités d’électricité », résume une méta-étude critique sur le sujet, menée en 2018 en Inde, à l’Institut de technologie Sikkim Manipal.
Les TENG pourraient d’abord être au cœur d’une véritable révolution textile, caractérisée par des vêtements qui produisent de l’électricité quand on les porte. En 2017, l’Université de Chine du Nord avait démontré la faisabilité du concept avec un textile triboélectrique à double couche : « L’énergie récoltée juste en marchant, en courant ou en tapotant suffit pour allumer directement 100 diodes connectées en série ou faire fonctionner des appareils portables comme un chronomètre de compétition, une horloge numérique ou une calculatrice électronique ». La même année, des travaux à l’université coréenne de Chosun proposait un autre design : un textile souple qui produit de l’électricité en s’étirant, permettant d’alimenter 54 LED à partir de mouvements humains.
Autre exemple, l’Université Nagoya au Japon a mis au point en 2020 un TENG transparent et étirable, à base de nano tubes de carbone, pouvant produire jusqu’à 8 W par mètre carré, uniquement par contact. Deux applications ont été développées : des « draps communicants sans fil » (qui envoient un signal numérique différent selon qu’on les tapote ou les effleure) et des « gants éclairants » (incluant des LED qui s’illuminent quand on bouge les doigts ou touche une surface). « Les technologies de récupération d'énergie qui convertissent de petites quantités d'énergie ambiante en énergie électrique peuvent constituer une alternative aux batteries pour alimenter les appareils portables », concluent les chercheurs.
Et les spécialistes semblent confiants quant à la possibilité pour les TENG de « passer à l’échelle » et de véritablement changer la donne. Des recherches pluridisciplinaires qui démarrent en juin 2021 en Irlande, sous l’égide de l’Université de Glasgow, entendent produire d’ici 2025 des TENG de nouvelle génération destinés aux textiles . « La technologie développée remplacera les encombrantes batteries et fournira une source d'énergie gratuite et continue, dérivée du mouvement humain », explique-t-on. Cela aura « un impact majeur » dans le domaine de la santé et du bien-être puisque l’idée est d’abord « d’alimenter de manière autonome une multitude d'appareils et de capteurs médicaux et de fitness portables, des tensiomètres et stimulateurs cardiaques aux capteurs de mouvement, oxymètres et glucomètres ». Ces textiles seraient aussi susceptibles d’alimenter ou de recharger des appareils dédiés au divertissement, tels que montres et lunettes connectées. D’ici 2027, il n’est pas exclu de pouvoir recharger un mobile « juste en marchant rapidement », avance même l’un des responsables du projet.
En 2019, des travaux d’une dizaine de chercheurs de plusieurs pays, menés depuis le Canada, avaient d’ailleurs conduit à des TENG produisant de l’énergie... à partir de neige. Ce « Snow-TENG » affiche « une densité de puissance de 0,2 mW/m2 et une tension en circuit ouvert jusqu'à 8V », et peut déjà fonctionner comme « une station météorologique miniaturisée pour surveiller la météo en temps réel et fournir des informations précises sur le taux et la profondeur de chute de neige, la direction du vent et sa vitesse dans des environnements enneigés et/ou glacés » — le tout sans nécessiter d’électricité.Selon les chercheurs, il pourrait même être « intégré dans des panneaux solaires pour assurer une alimentation électrique continue par temps de neige».
Les TENG pourraient d’ailleurs apporter un complément aux traditionnels moyens de production des énergies renouvelables. C’est ce qui est envisagé à Hong-Kong, où l’Université chinoise a montré en mars dernier des tubes à base de TENG capables de convertir le mouvement des vagues en électricité.
On pourrait ainsi continuer la liste des techniques envisagées pour récolter de l’énergie partout où elle existe. En Suisse, la start-up Mithras est par exemple en train de développer des solutions utilisant la différence de température entre le corps humain et l’air externe pour produire de l’électricité. Sont au programme un patch à vocation médicale, entièrement auto-alimenté et surveillant la température en permanence, ou un bracelet de fitness dont le nano générateur thermique génère 11,25 mW, apportant entre 50 et 100% de ses besoins en énergie.
Tout cela pointe dans la même direction : la possibilité bien réelle de produire de l’électricité de mille et une façons, y compris à chaque moment de la vie quotidienne.
Dans les années qui viennent vont apparaître de nouvelles familles d’objets électroniques portables, auto-alimentés et n’utilisant aucune source d’énergie externe. Comme le soutient Mithras (ou d’autres), « Ce n'est qu'une question de temps jusqu'à ce que la plupart, voire tous les appareils électroniques portables soient alimentés par la récupération d'énergie. Les avantages évidents de la production d’une énergie propre et illimitée là où on l'utilise établiront une nouvelle norme de l'industrie ».
A plus long terme, sans doute entre 2030 et 2040, des objets statiques ou portés vont contribuer à nous alimenter en énergie de façon continue. Revêtements de sols, murs, semelles de chaussures, matelas et vêtements serviront (aussi) à produire de l’électricité. Toute onde, tout mouvement naturel, toute différence de température, voire le moindre souffle d’air ou goutte de pluie, seront convertis en énergie utilisable — une énergie propre et quasi gratuite.
On comprend dès lors que l’équation électrique issue d’un monde de plus en plus connecté n’est pas forcément aussi problématique qu’on a pu le dire. L’Internet des objets (IoT), caractérisé par des milliards de capteurs et appareils électroniques communicants, ne va pas forcément nécessiter un accroissement drastique de la production conventionnelle d’énergie. Celle-ci va en fait se déporter — aux objets et aux activités humaines. Au moins pour certaines familles d’applications, l’énergie nécessaire, donc l’électricité, sera omniprésente et abondante.
Source : www.clubic.com
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