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Fusion nucléaire : la promesse d’une énergie écologique à profusion et gratuite ?
Technologie

Fusion nucléaire : la promesse d’une énergie écologique à profusion et gratuite ?

Article publié le :
14
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03
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2022

Le 3 mars dernier, la société américaine CommonWealth Fusion Systems a annoncé vouloir construire un campus de 20 hectares consacré à la fusion nucléaire. Son objectif est annoncé : fabriquer d’ici à 2025 le premier réacteur à fusion nucléaire produisant plus d’énergie qu’il n’en consomme.

SPARC et ITER

Un nouveau réacteur, baptisé SPARC, dépasserait ainsi les objectifs fixés par le projet scientifique mondial ITER (International thermonuclear experimental reactor), initialisé il y a maintenant plusieurs décennies, et pour lequel les investissements cumulés dépassent désormais les 20 milliards de dollars. De quoi s’interroger quant aux opportunités réelles de la fusion, ainsi qu’au rôle qu’elle pourrait jouer dans les décennies à venir. 

Le principe ? Reproduire la réaction de fusion de l'hydrogène qui survient naturellement au cœur du soleil et des étoiles pour produire de l'énergie de manière massive.

Grosse production énergétique

Contrairement à la fission nucléaire, qui a vocation à scinder des atomes lourds tels que l’uranium pour dégager de l’énergie, la fusion vise à faire fusionner plusieurs atomes légers (le deutérium et le tritium, des isotopes de l’hydrogène) et générer une énergie bien supérieure encore, de l’ordre de quatre fois plus que la fission.

Au-delà de cette capacité de production phénoménale – la même qui se tient au centre de notre soleil – cette source d’énergie dispose également de nombreux atouts écologiques, économiques et sécuritaires qui pourrait faire de cette rupture technologique majeure une véritable réponse aux enjeux de la transition énergétique.

Respect de l’environnement

L’énergie de fusion dispose avant tout de nombreux atouts écologiques, et ce, à tous les maillons de la chaîne. En amont de la production, le sourcing des matières premières nécessaires à la réaction de fusion ne demande pas d’exploitation minière ou de forage entraînant des dégâts sur l’environnement. Le deutérium peut être directement extrait de l’eau, à raison de 33 mg pour 1L d’eau.

Dans un réacteur à fusion idéal, 3 litres d’eau pourraient permettre de générer autant d’énergie que 1000 litres d’essence . Le tritium, du fait de sa durée de vie très courte (12 ans), sera quant à lui créé artificiellement au cours du processus de fusion par un procédé déjà maîtrisé utilisant du lithium, que l’on peut trouver dans l’eau de mer.

La fusion nucléaire est une source d’énergie très largement décarbonée puisque le processus de production n’émettra que de l’hélium en faible quantité, un gaz inerte et non toxique qui ne contribue pas à l’accentuation de l’effet de serre.

Par ailleurs, contrairement à la fission nucléaire qui génère des déchets radioactifs à haute intensité, les réacteurs de fusion ne produiront pas de déchets radioactifs à vie longue et seuls certains matériaux de la centrale en contact direct avec le plasma seront radioactifs pendant plusieurs dizaines d’années tout au plus, permettant ainsi une gestion raisonnée des déchets en aval du processus de production.

D’après les estimations de l’organisation ITER, les premiers réacteurs à fusion ayant une capacité à délivrer de l’électricité devraient générer entre 1 et 1,7 GW, de quoi alimenter entre 445 à 755 milliers de foyers environ . En outre, ces nouvelles centrales auront une capacité de production continue et programmable dans le temps, parfaitement complémentaires des énergies renouvelables.

Toujours selon ces mêmes estimations, le coût moyen par kilowattheure devrait être situé dans les mêmes grandeurs que les EPR actuels, voire un peu plus faible avec le temps grâce aux économies d’échelle et à l’effet d’expérience.

Pour une majorité de la communauté scientifique internationale, les conditions de production de la fusion nucléaire sont tellement compliquées à atteindre et à stabiliser que toute perturbation dans ce processus mettrait naturellement fin à la réaction, écartant de fait les scénarios catastrophes tels que ceux de Fukushima ou Tchernobyl.

En outre, la fusion nucléaire n’utilise pas de composant ou d’éléments pouvant être utilisés pour fabriquer des armes nucléaires, limitant ainsi les scénarios de prolifération potentiels.

Défis de taille

Malgré ces atouts indéniables, la mise en œuvre de la fusion nucléaire fait face à plusieurs défis de taille qui retardent son utilisation à grande échelle. Premièrement, les isotopes de l’hydrogène utilisés dans le processus de fusion (deutérium et tritium) se repoussent naturellement. Pour parvenir à un résultat, il est indispensable de transformer ces atomes en plasma en le soumettant à des températures extrêmes, de l’ordre de 150 millions de degrés Celsius.

Conséquemment à ce premier défi, l’installation doit donc réussir à fournir suffisamment d’énergie pour créer et maintenir ce plasma, tout en délivrant une puissance énergétique supérieure à celle qui a été utilisée pour le faire fonctionner, ce qui reste pour le moment inenvisageable.

Toutefois, si ses perspectives d’utilisation semblent encore éloignées, la communauté scientifique est activement mobilisée sur le sujet, à l’instar du bien connu projet ITER qui réunit 35 pays, et qui a vocation à démontrer la faisabilité physique de la fusion à travers une technologie Tokamak (une centrale en forme d’anneau creux dans lequel est maintenu le plasma grâce à un champ magnétique).

Le 14 avril 2021, au cours d’un séminaire organisé par l’association des alumni de l’école Centrale Paris, Bernard Bigot, directeur général du projet ITER, a présenté en détail les objectifs et jalons de ce projet scientifique international : ITER devrait, sauf catastrophe, arriver à son objectif de produire d’ici fin 2025 un premier plasma stable.

Rappelons néanmoins que ce projet n’a aucunement vocation à démontrer la faisabilité industrielle de la fusion, il ne s’agit que d’une expérience scientifique quine saurait à elle seule dresser les premiers jalons de l’utilisation de cette énergie d’avenir. Pour cela, il convient plutôt de regarder au niveau de la prochaine étape, baptisée “DEMO” (pour Demonstration Power Plant), qui aura vocation à démontrer la faisabilité de l’utilisation de la fusion pour produire de l’électricité à grande échelle.

Si plusieurs technologies de tokamaks sont encore à l’étude, la majorité des scientifiques s’accordent pour envisager une mise en fonction de ces technologies de démonstration à l’horizon 2040.

Energie quasi illimitée

À l’heure où la consommation d’énergie primaire pourrait croître de 46,9% d’ici à 2050 dans les pays de l’OCDE et de plus de 70% dans les pays en voie de développement, la maîtrise de la fusion nucléaire représente sans aucun doute l’un des projets les plus ambitieux du XXIè siècle.

Elle permettra de répondre à certaines problématiques, telles que l’indépendance énergétique des états qui la possède ou la garantie d’une énergie quasi-illimitée à fournir à leur population, favorisant ainsi un développement économique et social de grande ampleur.

Toutefois, l’horizon annoncé de la seconde moitié du siècle est bien trop éloigné pour envisager qu’elle puisse jouer un rôle dans la crise écologique que nous connaissons actuellement. La transition vers un modèle énergétique et écologique plus durable ne peut attendre tout ce temps, et la fusion ne doit aucunement justifier de se soustraire aux efforts consentis dans le développement des énergies renouvelables, qui rappelons le, pourront tout à fait être utilisées en complément des centrales à fusion.

Par ailleurs, son développement à grande échelle – si tant est qu’il se concrétise – prendra encore des dizaines d’années supplémentaires. À l’instar des centrales à fission actuelles, il y a fort à parier que seul un petit nombre de pays développés aient la mainmise sur cette technologie complexe et onéreuse dans la seconde moitié du siècle, ce qui repousse encore un peu plus son utilisation massive par l’ensemble de la population mondiale.

Dès lors, l’accès à cette énergie dans laquelle la communauté scientifique place tant d’espoir devra encore patienter un long moment avant de pouvoir jouer le rôle que l’on attend d’elle.

 

Sources : www.lemondedelenergie.com

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